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« Il faut déjà être à l’écoute du cheval qui ne boite pas mais dont le cavalier ressent une gêne inhabituelle, une baisse de performance au travail… »
Pour se déplacer avec aisance le cheval doit compter sur des articulations synoviales saines pour :
Une composante essentielle de l’articulation synoviale est le cartilage, un tissu conjonctif bien structuré, composé de cellules, les chondrocytes, et d’une matrice extracellulaire de collagène et de protéoglycanes (contenant des glycosaminoglycanes comme l’acide hyaluronique), qui agit comme une éponge. Elle s’écrase lors de la phase d’appui du membre du cheval et se gorge de liquide synovial durant la phase pendulaire du déplacement. L’intégrité des tissus mous périphériques (capsule et ligaments) offre quant à elle une stabilité indispensable à toutes les composantes articulaires.
Cette anatomie complexe prédispose à diverses affections dont les causes sont multiples. Si elles ne sont pas liées à la conformation ou à la présence d’une maladie comme l’ostéochondrose, c’est souvent l’homme qui, en imposant à sa monture des mouvements répétés voire parfois inappropriés, est à l’origine d’un stress biomécanique anormal sur une des composantes de l’articulation. Le travail du cheval de sport sollicite énormément les articulations et, selon la discipline pratiquée, certaines d’entre-elles sont plus soumises au stress biomécanique que d’autres, et donc plus prédisposées à développer un syndrome articulaire dégénératif (SAD). |
Quel que soit le traumatisme imposé à une articulation, il va induire la libération de médiateurs divers de l’inflammation (métalloprotéinases, prostaglandines, radicaux libres, interleukine-1, etc.) qui vont affecter l’intégrité du cartilage. Ce dernier en se détériorant progressivement va lui-même libérer d’autres médiateurs d’inflammation et un cycle vicieux dégénératif va alors s’installer puis s’auto-entretenir.
Cliniquement, lors d’un SAD, l’inflammation va engendrer distension articulaire, douleur, diminution de l’amplitude de mouvement et il en résultera pour l’œil averti du cavalier, une boiterie. En fonction de la composante articulaire impliquée, le SAD portera un nom différent : capsulite, synovite (souvent lors d’entorse), arthrite, arthrose et ostéoarthrose lors de l’implication du cartilage et/ou de l’os sous-chondral. S’il y a une mauvaise conformation des membres du cheval, de l'ostéochondrose ou un traumatisme unique majeur d’une articulation, un SAD pourra rapidement se développer, par contre cette symptomatologie n’apparait souvent qu’après de nombreuses années d’activités sportives pour un cheval soumis à un stress mécanique répété. Les membres sont bien sûr les plus touchés par ce syndrome mais la colonne vertébrale, notamment au niveau des cervicales, est aussi concernée.
La précocité et la précision du diagnostic d’un SAD sera le garant du succès thérapeutique. Après un examen clinique minutieux, parfois aidé d’un système basé sur des accéléromètres tels que le « Lameness Locator™ » pour objectiver une boiterie, et après la réalisation d’anesthésies sémiologiques pour en localiser le site, le vétérinaire fera appel à différentes techniques d’imagerie médicale. Toutefois aucune ne permettra une bonne visualisation du cartilage, c’est pourquoi l’insertion d’une petite caméra dans l’articulation (arthroscopie) reste la technique de référence pour évaluer l’état de dégradation de ce cartilage.
Le SAD est une affection dégénérative progressive qu’il n’est actuellement pas possible de guérir si on en est au stade d’usure du cartilage. L’objectif pour le gérer efficacement est donc de prévenir son apparition ou d’arrêter sa progression et de gérer la douleur du cheval. Prévenir l’apparition d’un SAD est bien sûr l’idéal. Cela se fait par :
Même si ces dernières substances sont bien tolérées chez le cheval et qu’une réduction de la douleur est observée avec l’harpagophytum utilisé en cure, la revendication chondroprotectrice de ces produits nécessite encore des études pour en évaluer leur impact thérapeutique réel. La notion de chondroprotection implique, en effet, la capacité à prévenir la dégradation du cartilage et à en stimuler la synthèse, ce qui est loin d’être prouvé dans la majorité de ces produits en vente libre. Dans la phase aiguë d’une majorité de SAD, le repos combiné à des anti-inflammatoires non stéroïdiens administrés par voie générale est suffisant pour enrayer l’affection et contrôler la douleur. Une autre approche efficace pour arrêter rapidement le cercle vicieux dégénératif est l’infiltration dans l’articulation de différents médicaments (corticostéroïdes, acide hyaluronique, Interleukin-1 RAP, cellules souches). De toutes ces options, la plus grande efficacité est liée à l’administration de corticostéroïdes, mais il faut être alerté d’un temps de retrait pour la compétition, temps variable en fonction de la molécule utilisée. Si une implication de l’os sous-chondral dans une phase ostéoclastique excessive est suspectée à la radiographie, il sera indiqué d’administrer un bisphosphonate (acide tiludronique ou clodronique).
Sur un plan chirurgical, l’offre thérapeutique est différente si le SAD atteint une articulation à petite ou à grande amplitude de mouvements. Pour les articulations à petite amplitude de mouvement (paturon, articulations inter-tarsiennes) il est possible d’avoir recours à l’arthrodèse qui consiste à enlever tout mouvement et donc toute douleur de l’articulation affectée. Pour les articulations avec une grande amplitude de mouvement (boulet, grasset, carpe) il faut avoir recours à l’arthroscopie ou l’arthrotomie, pour débrider les lésions dégénératives du cartilage, enlever des fragments, réparer des fractures et peut-être demain, pouvoir effectuer un resurfaçage du cartilage dégénéré pour conserver cette mobilité importante de l’articulation. L’administration intra-articulaire de cellules souches reste controversé quant à leur utilité et ce type de traitement ne peut en aucun cas régénérer le cartilage défectueux. Pour atteindre ce but, l’idée est d’implanter du cartilage autologue (cellules provenant du patient) dans les lésions d’arthrose. Pour cela des cellules cartilagineuses prélevées chez un patient sont multipliées en culture 2D/3D avant d’être réimplantées dans la lésion sous forme de petites billes de cartilage (chondrobeads). C’est l'un des sujets d’étude du Groupe de Recherche en Médecine et Rééducation des Equidés de Sports (GREMERES) de l’Ecole vétérinaire de Lyon, sujet développé en collaboration avec l’équipe du Docteur V. Tieng de l’Hôpital Universitaire de Genève. Un bel exemple d’approche « One Health » avec un transfert de technologie de la médecine humaine vers la médecine vétérinaire et réciproquement pour, in fine, améliorer le bien-être du cheval et de son cavalier.
A tout moment de sa carrière sportive un cheval peut subir un stress anormal sur ses articulations, pouvant être à l’origine d’un SAD. Il est du devoir du cavalier de reconnaitre, et du vétérinaire de diagnostiquer au plus vite cette affection pour arrêter le processus avant qu’il n’y ait une dégénérescence du cartilage. Un SAD est réversible au stade de la capsulite, de la synovite, ou même en présence d’un fragment, mais un cartilage détruit ne se régénère pas et la réparation de ce dernier en est encore au stade expérimental. Il faut donc tout faire pour en prévenir sa dégradation, et si la recherche vétérinaire doit se concentrer sur l’imagerie médicale et la médecine régénérative, il faut déjà être à l’écoute du cheval qui ne boite pas mais dont le cavalier ressent une gêne inhabituelle, une baisse de performance au travail… Prévenir un SAD c’est le guérir ! |